37 639,63€ c'est le montant exact des IJSS subrogées mais non remboursées d'une entreprise de 150 salariés sur les années 2023 et 2024. Cela représente près de 20 000€ de perte annuelle qui impactent directement notre trésorerie et peuvent vite faire mal au budget.
Si vous pratiquez la subrogation des IJSS dans votre entreprise, vous connaissez probablement cette frustration quotidienne : avancer les indemnités journalières à vos collaborateurs en toute bonne foi... et attendre indéfiniment le remboursement de la CPAM qui ne vient jamais.
Aujourd'hui, je partage mon retour d'expérience sans filtre sur cette problématique : les vraies causes de ces dysfonctionnements administratifs, les difficultés concrètes que j'ai rencontrées au quotidien, et surtout, les solutions opérationnelles que j'ai mises en place pour limiter ces pertes financières.
Note importante : Même si nous allons aborder certains dysfonctionnements administratifs de la sécurité sociale, cet article n'a pas du tout pour but de remettre en cause le rôle essentiel de la Sécurité Sociale ni le travail de ses agents. Comme partout, la qualité du travail dépend aussi des outils, des processus et du cadre qu'on nous donne, et je n'ai pas la prétention de connaître le contexte de travail des équipes de la sécurité sociale.
Les raisons de non-remboursement sont multiples et souvent combinées entre elles, ce qui ne facilite vraiment pas la tâche des équipes RH ! Voici les principales causes que j'ai identifiées au fil de mes expériences :
1. Arrêts maladie non transmis à la CPAM : Le salarié transmet consciencieusement son arrêt via Slack ou email à l'équipe RH, mais ne pense pas forcément à envoyer les volets 1 et 2 par courrier postal à sa CPAM. Cette étape oubliée bloque complètement le dossier chez eux, et donc aucun remboursement n'est possible.
2. Documents "perdus" en cours de route : Est-ce un problème chez La Poste ou à la Sécurité Sociale, je ne sais pas, mais j'ai constaté un taux non négligeable de salariés qui envoient bien leur arrêt par courrier, mais qui ne sont jamais reçus par la CPAM. C'est un vrai mystère administratif !
3. Différences employeur/salarié : Il arrive parfois qu'il y ait un écart entre les informations que transmet le salarié et ce que transmet l'employeur via Net-Entreprises ou la DSN. C'est plus rare pour les arrêts maladie classiques (sauf erreur de saisie), mais cela arrive parfois sur les congés maternité qui ont été décalés et pour lesquels la salariée ne pense pas forcément à envoyer l'information du décalage à la CPAM. Dans ce cas précis, cela peut bloquer le remboursement de tout le congé maternité, ce qui représente des montants considérables.
4. Oubli de déclaration employeur : Plus rare encore, mais cela arrive parfois, un oubli de déclaration de l'employeur ou du cabinet de paie. L'erreur est humaine, et même avec les meilleurs processus, ces situations peuvent se produire.
5. Oubli de traitement CPAM : Pareillement, il arrive que tout soit en ordre administrativement parlant, mais que le dossier n'ait pas été validé côté CPAM. À priori, le remboursement des IJSS reste encore une opération largement manuelle dans les CPAM, ce qui explique ces oublis.
1. Le Silence Radio Administratif (Le Plus Frustrant !)
C'est la plus grosse difficulté à mon sens : si on ne demande pas activement, on n'a aucune information sur le traitement des dossiers. Concrètement, on envoie consciencieusement notre attestation de salaire en tant qu'employeur, mais si le salarié n'envoie rien de son côté à la CPAM, on ne reçoit aucun petit message nous expliquant qu'il y a un problème.
Il faut alors patienter, surveiller régulièrement les bordereaux de paiement sur Net-Entreprises, et décider à un moment donné qu'on a dépassé le délai "normal" de traitement d'un dossier et qu'il y avait sûrement un problème quelque part.
2. Des délais et procédures kafkaïennes
Les délais d'obtention d'une réponse sont vraiment problématiques. Comme les délais de traitement des remboursements peuvent être élevés, on attend justement plusieurs semaines ou mois avant de les contacter lorsqu'on suspecte un problème.
Si on envoie une réclamation par courrier : encore plusieurs semaines ou mois avant d'avoir un retour, et le retour semble être loin d'être systématique dans ce cas-là.
Ou alors on décide de les appeler directement : j'ai appelé 3 caisses différentes cette semaine, et j'ai dû rester en attente entre 30 et 55 minutes à chaque fois. Cela se solde souvent par la demande de renvoyer un document par courrier, et donc le début d'une nouvelle période de plusieurs semaines de délai de traitement.
La conséquence dramatique : quand il manque un document ou autre de la part d'un salarié, il faut espérer très fort que le salarié ait conservé tous les documents nécessaires qui datent d'il y a plusieurs mois, et parfois même plusieurs années ! Pour preuve, j'essaie toujours de régulariser des dossiers de 2023... Est-ce que vous avez gardé votre arrêt maladie d'une semaine qui date d'il y a 2 ans ? 😅
3. Le dilemme des alternatives limitées
Une autre difficulté majeure, c'est la question des alternatives. Que faire concrètement si la CPAM décide de ne pas rembourser, ou pire, de juste ne jamais répondre à notre demande de remboursement ?
Est-ce qu'on demande plusieurs mois ou années plus tard au salarié de rembourser plusieurs centaines ou plusieurs milliers d'euros, sous prétexte de soucis administratifs de la sécurité sociale ? Ou alors est-ce qu'on décide d'arrêter complètement la subrogation ? Dans les deux cas, c'est rationnellement logique, mais socialement très difficile à mettre en œuvre.
4. L'Effet Domino Dévastateur sur la Prévoyance
Il y a aussi l'effet boule de neige qui est particulièrement difficile à gérer. Pour les arrêts de plus longue durée, la prévoyance ne payera pas sa part si la CPAM n'a pas elle-même indemnisé au préalable. Donc en plus de la perte du remboursement de la sécurité sociale, on perd aussi la partie prévoyance, et à la fin c'est l'employeur qui couvre 100% du maintien de salaire (ou moins selon les cas et les conventions collectives).
5. La multiplicité des interlocuteurs
Un point souvent sous-estimé : chaque arrêt est géré par la CPAM du département de résidence du salarié, et non pas du lieu de travail. Pour nous, c'est une quinzaine de CPAM différentes avec lesquelles il faut gérer les soucis administratifs.
Et par téléphone, la plupart des CPAM ont des consignes qui restreignent le nombre de dossiers traités par appel téléphonique, généralement entre 1 et 3 maximum par exemple. Imaginez la logistique quand vous avez 15 dossiers à traiter ! (et je n'ose imaginer pour les entreprises encore plus grandes).
1. Formation proactive et sensibilisation des collaborateurs
De manière générale, j'ai décidé de "former" systématiquement mes salariés sur la procédure complète à tenir en cas d'arrêt de travail. Cela passe par une documentation claire avec une infographie, des rappels réguliers, et une sensibilisation à l'importance de chaque étape administrative.
Dès qu'on reçoit un arrêt d'un salarié, je lui rappelle maintenant systématiquement qu'il doit envoyer les volets 1 et 2 à la CPAM (pareil pour les décalages de congé maternité) et je l'invite fortement à conserver une copie "au cas où" les choses se compliqueraient.
2. Mise en Place d'un Fichier de Suivi Détaillé
J'ai développé un système de suivi rigoureux avec un fichier Excel qui centralise toutes les informations :
On y met chaque arrêt de plus de 3 jours dès qu'on les reçoit (entre 1 et 3 jours il y a peu d'utilité car la carence fait qu'il n'y a aucun remboursement à attendre de la CPAM) avec la date de début et de fin précises.
On coche une case dès qu'on a eu confirmation que le salarié a bien envoyé les volets 1 et 2 à la CPAM, et si on n'a pas de confirmation, on relance systématiquement le salarié.
On met à jour la date de fin dès qu'on a reçu une prolongation de la part du médecin.
On y inscrit toutes les périodes de remboursement qu'on a effectivement reçues de la CPAM (c'est cette partie que je vérifie maintenant une fois par mois).
On suit également sur le même fichier la partie prévoyance pour avoir une vision globale.
3. Contrôle régulier des remboursements
J'ai instauré un rituel mensuel de vérification : je contrôle maintenant plus régulièrement les remboursements d'IJSS et j'alerte plus rapidement en cas de manque. Par exemple, si on n'a pas de remboursement 2 mois après la période concernée, on contacte directement la CPAM pour avoir des explications.
Cette approche proactive permet d'identifier les problèmes beaucoup plus tôt, quand les documents sont encore facilement accessibles et que la mémoire des événements est encore fraîche.
Les idées pour la suite ? On ne peut qu'espérer que la sécurité sociale développera enfin une vraie plateforme partagée avec les employeurs et les salariés pour la réconciliation des arrêts maladie : gestion des dates en temps réel, dépôt des pièces justificatives, notifications automatiques, suivi de l'avancement des dossiers, etc.
En attendant cette évolution technologique qui semble indispensable, une gestion proactive et ultra-structurée reste notre meilleure défense contre ces dysfonctionnements administratifs chronophages.
Et Vous, Quelle Est Votre Expérience Concrète ?
J'aimerais vraiment connaître votre retour d'expérience sur ce sujet :
Avez-vous une expérience différente de la mienne avec les CPAM ?
Quel est votre taux de perte approximatif sur les IJSS subrogées ?
Avez-vous développé d'autres solutions ou d'autres constats que je n'ai pas mentionnés ?
Quels outils utilisez-vous pour optimiser le suivi de ces remboursements ?
Si vous aves besoin d'un coup de main sur ce sujet, et bien d'autres, jetez un coup d'oeil à mes offres d'accompagnement.
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